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La montée vers Tserle

Durant l’escalade du mont d’Hypérion, Amos se rendit compte que ses hôtes étaient en fait de la race des korrigans. Ils étaient en tout point conformes à la description que lui avait fournie Al-Qatrum, excepté qu’ici, sur le continent de l’air, ils ne s’exprimaient pas en vers. Les korrigans du mont d’Hypérion ne faisaient pas de rimes, mais ils parlaient sans cesse. Du matin au soir, ils enchaînaient phrase sur phrase d’une voix tonitruante et d’un ton assuré. Même si la plupart du temps ils racontaient les pires bêtises qui soient, ils le faisaient toujours avec un sérieux exagéré. Ces petites créatures avaient un avis sur tous les sujets. De la teinte de la neige jusqu’à la confection d’un bon chapeau, de la naissance des dieux jusqu’aux fonctions de l’herbe sur la montagne, tout y passait. Les korrigans pouvaient également se quereller pendant des heures sur des futilités, sans jamais prendre le temps d’écouter les arguments des autres.

Plax, le chef de l’expédition qui avait accueilli Amos, était sûrement le pire d’entre tous. C’était un véritable moulin à paroles qui ne manquait jamais de salive. Il ne gardait rien pour lui et exprimait chacune de ses pensées. On aurait dit qu’il était incapable de la moindre discrétion, qu’il devait sans cesse révéler ses réflexions les plus intimes. C’est ainsi que le porteur de masques, qui marchait à ses côtés à l’avant du groupe, apprit que Plax avait une relation difficile avec sa femme. Il lui reprochait surtout de ne pas savoir l’écouter et de discuter chacune de ses décisions. « Une vraie harpie ! En plus, on dirait qu’elle est sourde ! » répétait-il souvent.

Ce qui fascina le plus Amos pendant le trajet, c’est que, malgré le désordre du groupe, chacun accomplissait sa tâche avec précision et dynamisme. Les korrigans, ces petits êtres qui semblaient incohérents et individualistes, fonctionnaient toutefois à merveille en groupe. Jamais quelqu’un n’avait à demander un coup de main pour accomplir telle ou telle tâche, car toujours il y avait un korrigan qui offrait son aide au bon moment. En route, les tentes étaient montées en quelques minutes seulement et les repas étaient préparés en aussi peu de temps. Plax n’avait qu’à hurler un ordre, auquel personne ne semblait pourtant prêter attention, pour que celui-ci fût exécuté sur-le-champ. Amos avait vite appris que s’il voulait quelque chose, il devait se mêler à une discussion et parler en même temps que tout le monde. Sans que les palabres cessent, tout se mettait aussitôt en branle. Au début, pour tester l’efficacité de sa méthode, le garçon avait plusieurs fois formulé tout haut, sans s’adresser à personne en particulier, le désir d’avoir un peu d’eau. Chaque fois, on lui avait mis une gourde dans la main.

L’ascension du mont d’Hypérion se fit lentement et dans d’excellentes conditions, malgré quelques embûches et passages dangereux. Les korrigans, accoutumés à fréquenter les sommets, savaient cependant qu’il en était autrement pour Amos et que l’altitude pouvait représenter un danger important pour lui. Même s’il avait parcouru les hauteurs de la cité de Pégase et qu’il était habitué aux voyages aériens avec Maelström, la montagne n’avait rien en commun avec ce qu’il avait déjà connu. Il s’agissait d’une escalade qui allait le mener à des sommets qu’il n’avait jamais franchis auparavant.

— Bien que vous soyez en très bonne forme, monsieur Daragon, dit Plax, nous devons y aller progressivement. L’air se fait plus rare ici et votre corps sera bientôt en manque !

En effet, depuis le début de l’ascension, Amos remarquait qu’il était de plus en plus essoufflé et que ses muscles semblaient plus lourds au fur et à mesure qu’il progressait. Sans en parler à quiconque, il avait même utilisé ses pouvoirs de porteur de masques pour faire venir jusqu’à ses poumons l’air oxygéné du bas de la montagne. Grâce au courant ascendant qu’il avait créé, le garçon avait pu mieux respirer et reprendre des forces.

— Il faut manger léger ! ne cessait de répéter le korrigan lorsqu’il était à court de sujets de discussion. Les repas doivent être plus fréquents mais plus légers ! Pas de viande surtout ! Des noix, du fromage, du pain et des gâteaux au miel, voilà comment doit se nourrir un vrai grimpeur !

Amos aurait voulu dire à Plax que cela faisait au moins dix fois qu’il entendait les mêmes recommandations, mais il était trop épuisé pour parler. En guise de réponse, il se contentait de murmurer des « hum » affirmatifs qui relançaient de nouveau le korrigan dans un bavardage ennuyeux.

Bien emmitouflé dans une cape en peau de yack, Amos contempla la montagne enneigée en se remémorant l’aventure qu’il avait vécue avec Béorf, à Ramusberget.

« L’escalade m’aurait paru moins pénible avec Béorf, pensa-t-il, mélancolique. Les épreuves sont tellement plus faciles à vaincre quand on a un bon partenaire de voyage. Et nous avons vécu tant de choses ensemble… J’espère qu’il ne m’en veut pas de l’avoir abandonné. En tout cas, je sais que s’il était ici, il y a longtemps que le korrigan aurait fermé son clapet… Béorf l’aurait bâillonné puis lancé dans une crevasse… »

— Je vois à votre sourire que mon histoire vous plaît, Amos Daragon ! s’exclama Plax.

Amos eut envie de répliquer, mais il se contenta simplement de sourire davantage. Il aurait été soulagé de lui avouer que ses histoires étaient aussi endormantes qu’une journée de pluie en automne, mais cela aurait été inutile. Les korrigans étaient ainsi faits et il n’aurait rien gagné à chagriner ou à insulter Plax.

— J’admire beaucoup votre sens de l’écoute, le complimenta Plax, c’est si agréable de discuter avec vous. Nos conversations vont beaucoup me manquer lorsque nous nous séparerons… J’ai l’impression que nous sommes comme de vieux copains, pas vous ?

Amos voulut lui répondre qu’il se souviendrait sans doute très longtemps de cette escalade en sa compagnie, mais Plax enchaîna immédiatement, lui enlevant ainsi la chance de parler.

— Encore un petit effort et nous arriverons bientôt au troisième camp ! Nous nous y reposerons avant d’entreprendre la dernière étape. Mes hommes et moi vous conduirons le plus près possible du sommet, mais, comme je vous l’ai déjà dit, vous devrez faire seul le dernier bout de chemin. Dépêchons-nous, je pressens une tempête de neige toute proche… Euh… ma femme… Vous ai-je déjà parlé de ma femme ? Hou là là ! Une vraie harpie, celle-là ! Écoutez ceci…

C’est à bout de souffle, certes, mais aussi à bout de nerfs qu’Amos arriva au troisième camp. De petites maisons de pierre aux murs épais et à la toiture composée de galets accueillirent le cortège de grimpeurs. C’est avec soulagement que le garçon se vit assigner pour lui seul une des habitations. Terminé, du moins pour la nuit, les jacasseries de Plax et ses sempiternelles mêmes histoires !

Sans dire un mot, Amos ouvrit la petite porte de bois et dut se pencher pour la franchir. Il n’y avait qu’une seule grande pièce dans un coin de laquelle on avait empilé une bonne quantité de bûches. Le porteur de masques en déposa immédiatement quelques-unes dans l’âtre, puis il claqua des doigts afin qu’elles s’enflamment. Ensuite, il s’installa confortablement devant le feu et avala ses dernières réserves de nourriture. Son sac de voyage en guise d’oreiller, il s’allongea sur le sol et, repu, il s’endormit rapidement.

C’est un petit bruit sec qui réveilla Amos au beau milieu de la nuit. En ouvrant les yeux, il aperçut une étrange créature assise sur le tas de bûches. Il s’agissait d’une petite vieille avec de longs cheveux poivre et sel qui… tricotait paisiblement près du feu. Pieds nus, elle était cependant enveloppée d’un long manteau blanc avec un capuchon. Sa peau noire, ses oreilles pointues et ses larges narines indiquaient bien qu’il s’agissait d’une korrigane.

— Oh ! oh ! lança-t-elle, confuse, en cessant de tricoter. Je vous ai réveillé, n’est-ce pas ? Je suis désolée, je ne voulais pas vous déranger ! Rendormez-vous, je tâcherai de ne plus faire de bruit avec mes aiguilles.

— Je crois que nous n’avons jamais été présentés, je me trompe ? répondit le garçon en se frottant les yeux. Je suis Amos…

— …Daragon, oui, je sais…, le coupa la petite vieille. Moi, je me nomme Bean. Si. Je suis une bonne amie de Tserle que vous êtes venu secourir. Je suis aussi un peu son enseignante, son maître spirituel si vous voulez… Enfin, cela n’a pas beaucoup d’importance… Allez, dormez maintenant. Nous en reparlerons après votre nuit de sommeil.

« Hein ? Ah, oui, d’accord… Mais dites-moi, partageons-nous la même habitation ? demanda Amos d’une voix encore lourde de sommeil.

— Mais non, pas du tout, répliqua Bean. Si, un peu embarrassée. C’est que Plax et ses compagnons sont si bruyants et jacasseurs que j’arrive à peine à les supporter. Je me suis réfugiée ici pour terminer en paix mon tricot… Je sais qu’ils ne viendront pas vous déranger, alors… Bon, ça suffit pour l’instant. Je vous laisse dormir ! Encore une fois, je suis vraiment désolée de vous avoir réveillé…

— Mais non, ne vous en faites pas. Je suis heureux de vous rencontrer, lui assura Amos qui était à présent complètement réveillé. Et j’aimerais que nous parlions de Tserle maintenant.

— Écoutez, nous aurons tout le temps d’en parler demain ou même un autre jour, puisque la tempête fait rage à l’extérieur. Nous serons sans doute bloqués ici quelques jours avant de pouvoir entreprendre la dernière étape.

— J’insiste, je vous en prie… J’aimerais aussi savoir à quoi m’attendre une fois que je serai là-haut.

— Attendez-vous à essuyer la pire des tempêtes que vous ayez jamais connue, souffla Bean. Si en fronçant les sourcils. Au faîte du mont d’Hypérion, même les porteurs de masques sont incapables de contrôler les éléments. Le vent et le froid sont si… si… comment dire ?…

La vieille korrigane cessa de parler et s’essuya les yeux. Elle toussota afin de s’aider à reprendre un peu de contenance et elle poursuivit :

— Le vent et le froid sont si terribles qu’ils peuvent vous geler sur place en moins d’une heure.

— Et c’est ce qui est arrivé à Tserle, n’est-ce pas ? demanda Amos. Elle est congelée en haut de cette montagne ?…

— Oui, c’est bien cela… Je lui avais déconseillé de s’y rendre, car je soupçonnais qu’il s’agissait d’un piège des dieux. Mais, comme elle pensait y trouver les pierres de son masque de la terre, elle ne m’a pas écoutée et elle est partie. Cela fait des mois…

— Tout à l’heure, vous m’avez dit que vous saviez que j’étais venu aider Tserle. Comment l’avez-vous appris ?

— C’est un envoyé de la Dame blanche qui m’a dit d’attendre un jeune porteur de masques nommé Amos Daragon. Il m’a affirmé que vous viendriez la sauver en apportant avec vous les pierres de puissance qui lui manquent et dont elle a tant besoin. Dites-moi… les avez-vous en votre possession ?

— Oui, je les ai, ici, dans une bourse à l’intérieur de mon armure.

— J’aimerais beaucoup les voir, chuchota la vieille korrigane, serait-ce trop demander ?

— Si vous aimez les pierres, en voilà justement une qui est magnifique ! s’exclama le garçon en présentant le pendentif magique de l’amazone. Voyez cette pureté ! Elle est si claire qu’on voit à travers !

— Intéressant, fit la créature, mais les autres pierres m’intéressent davantage.

Rapide comme l’éclair, Amos saisit d’une main sa longue aiguille à tricoter et la lui enfonça d’un coup dans le corps. Il la plaqua contre le mur et lui assena un solide coup de poing sur le nez avant de l’empoigner par les cheveux pour la projeter vers le fond de la pièce où elle se fracassa la tête. Puis trois projectiles de feu eurent vite fait de clouer au sol la korrigane qui, soudainement, se métamorphosa en loup !

La bête, étourdie, releva la tête et fixa Amos droit dans les yeux.

— Comment savais-tu, petit morveux, que je n’étais pas une korrigane ?

— C’est facile. D’abord, vous ne savez même pas tricoter ! lança le garçon, prêt à se battre. Voyez comme toutes les mailles de votre ouvrage sont inégales. Ensuite, quand on a entendu Plax parler pendant des heures, on sait que les femelles korriganes ne sont pas très différentes des mâles, c’est-à-dire quelles sont à la fois impolies, bavardes et déplaisantes. En plus, il n’y a que les porteurs de masques qui s’intéressent vraiment aux pierres de puissance, puisqu’elles ne sont précieuses que pour nous ! Finalement, le pendentif m’a révélé ce que je voulais savoir, soit que vous êtes un imposteur. Maintenant que vous avez vos réponses, c’est à mon tour de poser les questions ! Qui êtes-vous et que faites-vous ici ?

Tenant le bout de la longue aiguille à tricoter dans sa gueule, le loup la retira péniblement de son ventre maculé de sang et s’assit pour discuter.

— Tu es devenu puissant depuis notre dernière aventure, dit posément la bête au pelage noirci par le feu.

— Excusez-moi, mais je ne me rappelle pas avoir jamais croisé votre route !

— Mais si, mais si, insista le loup. C’est moi qui ai lancé Baya Gaya à tes trousses alors que tu te dirigeais vers l’île de Freyja. C’est aussi moi qui ai coulé tes amis béorites. Dis-moi, tu te souviens bien de ton aventure à l’île de Freyja ?

— Vous êtes un des avatars du dieu Loki ! Si vous désirez me prendre les pierres de puissance, il faudra venir les chercher !

— Très peu pour moi, fit le loup. Je suis déjà presque K.O., mais il me reste encore assez de force pour te conseiller de ne pas aller au sommet de cette montagne. Comme il ne s’agit pas d’un froid ordinaire, tu y demeureras figé pour l’éternité, tout comme Tserle.

— Je tente quand même ma chance !

— Écoute, jeune imbécile, ta magie ne pourra rien contre le climat de là-haut ! répliqua l’avatar de Loki. Joins-toi plutôt aux dieux ! Nous ferons de toi le maître du monde. Tu régneras sur les quatre continents et tu seras adulé par des millions d’êtres humains. Tu dicteras les lois et ainsi il te sera possible d’établir une paix durable qui survivra longtemps après ta mort. Je t’offre une chance extraordinaire, celle de devenir un dieu sur terre !

— Pars ! Je t’ordonne de quitter cet endroit immédiatement ou je te réduirai en poussière !

— Très bien, mais je te rappelle que tu commets une grave erreur en t’obstinant à grimper là-haut ! déclara le loup en claudiquant vers la porte. Sache que même les feux de l’enfer n’arriveraient pas à réchauffer le sommet de cette montagne. Tu mourras gelé !

— Et ne t’avise plus de revenir, le menaça Amos. Tiens, au fait, voici un cadeau de la part de mes amis béorites que tu as lâchement noyés !

En utilisant la puissance de son masque de l’air, le garçon expulsa l’air des poumons de la bête et ordonna à l’élément de ne plus y pénétrer.

— Maintenant, tu peux comprendre ce que tu leur as fait subir ! lui dit-il entre les dents.

La bête, paniquée, se jeta contre la porte et la brisa en morceaux. Incapable de respirer, elle déguerpit dans la tempête et y disparut. Le fracas de la porte avait attiré quelques korrigans curieux qui examinèrent avec étonnement les dommages de la petite maison.

— Dites à Plax de plier bagage et de retourner immédiatement et avec tout le monde en bas de la montagne ! ordonna Amos. Et pas de discussion ! Tant pis pour ceux qui s’entêteront à rester, car, bientôt, le Phénix parlera à son peuple !

 

La fin des dieux
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